Fin de la Solitude franco-canadienne 2022

Ce lundi 14 novembre matin, nous avons entamé la dernière semaine de notre Solitude à Limonest. Le Père Andrew Szablewski prévu pour animer la session sur le thème de la formation humaine n’a pas pu faire le déplacement. Supérieur du séminaire Saint Joseph D’Edmonton, il a été retenu par des programmes importants liés à la vie du séminaire dont il a la charge. Aussi a-t-il décidé, de concert avec nos responsables ici, d’intervenir en distanciel par Zoom. Entre l’Ouest du Canada où se situe la ville d’Edmonton et Lyon, il y a huit heures de décalage horaire. Ainsi, nous avons aménagé le programme de sorte à avoir, chaque jour, deux heures de conférence avec lui, de 15h à 17h, heure de Paris, soit de 7h à 9h, heure de l’Ouest du Canada. La présente chronique retracera, succinctement, l’articulation de cette session sur le thème fondamental de la formation humaine, et décrira la vie de notre communauté marquée par quelques événements importants, cette dernière semaine.


1- La formation humaine : un parcours bien apprécié par les Solitaires


L’approche pédagogique que le Père Szablewski a choisie pour nous entretenir pendant les quatre jours de son intervention nous permet d’articuler ce parcours par l’évaluation des objectifs. Chaque jour, en effet, avait son objectif clairement énoncé en début de séance. Aussi, ce lundi matin après s’être présenté et avoir montré l’importance de la formation humaine, le Conférencier a-t-il énoncé l’objectif de ce premier jour comme suit : Regarder brièvement la complexité de l’être humain dans le contexte de la formation humaine pour l’identité de la formation sacerdotale. Pour atteindre cet objectif, il lui a fallu d’abord relever l’insuffisance de certaines approches philosophiques et psychologiques face à la complexité de l’être humain. Après avoir ainsi aiguisé notre attention à la vigilance et au discernement face à ces perceptions erronées de l’être, situant la personne seulement par rapport à elle-même, le Père Szablewski nous a conduits progressivement à découvrir la vision anthropologique chrétienne axée sur la relation. L’étude de la personnalité devient, ainsi, comme un instrument non seulement pour notre propre compréhension de nous-mêmes mais aussi pour notre ministère de prêtres et de formateurs des futurs prêtres. Pour la vision chrétienne de l’homme, la vocation humaine se manifeste pleinement dans le dépassement de soi pour se donner à d’autre, dans le décentrement de soi pour l’accueil des autres. Ainsi, La formation humaine se développe dans la dynamique de la formation spirituelle d’autant plus que l’homme est ouvert à l’Absolu, au Transcendant. Le Conférencier a alors déduit que la formation humaine des futurs prêtres doit être fondée sur une anthropologie chrétienne et une conception ajustée de l’homme. Il a développé avec nous quelques caractéristiques de la vision chrétienne de l’homme avant de nous faire prendre conscience de l’ambivalence de la personne humaine, ce qu’il a désigné par la dialectique fondamentale. L’être humain, en effet, se révèle être fondamentalement ambivalent par nature. Pour notre Conférencier, cette dialectique fondamentale est ontologique et constitutive de l’homme. A partir du tableau de Johari, il nous a montré la part considérable que prend l’inconscient en chaque être humain.


L’objectif du deuxième jour était de déterminer le profil de la personne qui décide de suivre le Christ pauvre, chaste et obéissant. Avec le Père Conférencier, nous avons d’abord distingué trois niveaux psychiques chez le sujet humain : psycho-physiologique, psycho-social et psycho-spirituel. Le premier est de l’ordre des besoins que l’être humain cherche à assouvir ; le deuxième est relatif à la tendance à l’action et le troisième est la capacité humaine à pénétrer la nature des choses. Cette capacité d’abstraction est le propre de l’homme. Il lui permet de transcender le monde matériel par abstraction. Le Conférencier a également souligné le niveau surnaturel ou transcendantal qui est celui de la grâce divine dans la personne humaine. Il est donc important de voir comment la personne consacrée ou en voie de l’être intègre ces différents niveaux. Afin d’aider à ce discernement, il était important d’étudier les structures de la personnalité. C’est bien ce que nous avons fait dans la suite des enseignements de ce deuxième jour. Nous avons découvert que du point de vue psychologique, l’identité est composée de deux structures fondamentales de la personnalité : le soi idéal et le soi actuel. L’étude de la structure de l’être humain nous a conduits à déterminer des critères de maturité ou d’immaturité d’une personne humaine, d’un sujet en formation. De façon globale, une personne est mature quand elle peut gérer un vaste champ de la conscience tandis que la dimension inconsciente conserve un pourcentage inconnaissable normale de la répression.


L’objectif du troisième jour s’est énoncé comme suit : voir si c’est possible que la personne entre dans la vocation non seulement pour la recherche des valeurs mais aussi pour la gratification de ses besoins, y compris les besoins incompatibles avec sa vocation. Il s’agissait de voir comment aider le candidat à discerner une telle présence d’incompatibilité ou d’incohérence. Nous avons commencé ici à définir trois contenus de la personnalité reconnus comme tels par le Père Luigi Rulla, prêtre Jésuite fondateur de l’école de psychologie à Rome : les besoins, les valeurs et les attitudes. Pour le Père Szablewski, la maturité vocationnelle dépend de l’intégration de ces trois valeurs. Après avoir passé en revue ces trois contenus dans un développement scandé par des exemples, le Conférencier a conclu que dans le cadre de l’étude de l’identité vocationnelle, il ne faudrait pas considérer seulement le comportement extérieur du candidat ou de la personne ordonnée, mais aussi voir les vraies motivations de ses attitudes. Ce dernier aspect nous a conduit au développement des tensions anthropologiques. Celles-ci sont bien présentes dans chaque personne jusqu’à la mort. Ces tensions peuvent être perçues comme la lutte qui accompagne tout le développement de l’homme, conclut le Père Psychologue.


Le quatrième et dernier jour de ce parcours, l’objectif a été de parler brièvement du cheminement vocationnel dans ses étapes dans le contexte de ce qui a été précédemment dit. Avant d’énumérer et de définir les différentes étapes du cheminement vocationnel, le Père Szablewski a précisé que l’identité vocationnelle se forme avec le temps et s’acquiert progressivement en intégrant dans la vie des valeurs vocationnelles et en se laissant transformé par elles. Selon lui, le processus de formation se divise en différentes étapes : l’appel divin ; le début de la coopération de l’homme ; la décision initiale ; l’intégration de soi avec le Christ. Nous avons terminé cette quatrième journée avec les quatre niveaux de l’opération humaine :La phase de la formation à « l’attention à… » ; la phase de la formation à « la libération de » ; la phase de la formation à « la liberté pour » et la phase de la formation au « courage de »…


En définitive, on peut retenir de ce cheminement la nécessité de se connaitre qui est essentielle dans le cheminement vocationnel, l’importance de la découverte progressive de sa personnalité qui demande la patience et l’écoute attentive et l’action de Dieu qui requiert une ouverture à la grâce et un abandon à l’Esprit-Saint qui nous guide et nous façonne.


Bien avant le début de cette séance, nous avons eu la joie d’accueillir le Père Argiro qui nous a donné des nouvelles de sa santé et nous a félicités pour le parcours effectué. Nous l’avons remercié et salué en retour par de vibrants applaudissements avant qu’il ne cède l’espace au Père Andrew Szablewski.


Dans la matinée de ce même jeudi, nous nous sommes réunis à 9h dans la salle de conférence pour procéder à une évaluation générale de la Solitude. L’expérience a été, de façon globale, appréciée par les Solitaires qui ont cependant relevé quelques aspects pouvant être améliorés pour une éventuelle autre Solitude ici à Limonest dans la maison des prêtres du Prado.

 

2- La célébration anticipée de la fête de la Compagnie (la présentation de la Vierge Marie au temple) 


Ce vendredi 18 novembre 2022 est le jour défini, dans le programme de la Solitude, pour la clôture formelle de la Solitude par la célébration anticipée de la fête de la présentation de la Vierge, fête patronale de la Compagnie des Prêtres de Saint-Sulpice. Ce jour a été minutieusement préparé tant dans son aspect liturgique que gastronomique. L’avant-veille au soir, nous avons eu un temps de répétition des chants transcrits dans des livrets imprimés et distribués à chaque Solitaire. Des courses ont été également faites par les chargés de la restauration et de l’économat. Des consignes ont été, enfin, donnés à la cuisine pour que les cuisiniers veillent à la qualité du repas de midi. 


Au matin de ce vendredi, nous nous sommes d’abord rendus à la chapelle pour prier les Laudes. Nous avons, ensuite, bénéficié d’un temps raisonnable pour nous apprêter pour la célébration de la messe. Celle-ci a commencé à 11h par une procession des Solitaires avec le Père Daniel et Monseigneur Emilius Goulet qui logiquement l’a présidée. Nous avons chanté en Français, en Espagnol, en Lingala (Congo) et en Fon (Bénin) puis nous avons prié aussi en Japonais et en vietnamien. Tout avait été minutieusement préparé de sorte qu’il n’avait pas de place pour l’improvisation. Dans son homélie, Mgr Goulet nous a profondément introduits sur le mystère de la présentation de la Vierge, l’Arche-Nouvelle, la Nouvelle-Eve. Il a montré le parallèle entre la consécration de la Vierge et notre propre consécration et conclu que « la Vierge de la présentation nous rappelle le don de nous-mêmes que nous avons fait au Seigneur ». Après quelques photos prises juste à la sortie de la messe, nous nous sommes rendus au réfectoire où tout était apprêté au ton de la fête. Nous avons d’abord pris un temps d’apéritif avec les Pères, les Sœurs et tout le personnel du Prado venus communier à notre action de grâce avant de passer à table. Nous avons bien mangé dans une ambiance cordiale et fraternelle. L’occasion a été propice pour les remerciements et les remises de cadeaux symboliques.


L’après-midi a été laissé libre pour permettre à nos confrères de la Province du Canada qui doivent voyager le lendemain de préparer leur valise. Après la prière des Vêpres et le dîner, nous nous sommes rendus dans la salle de télévision où nous avons écouté un beau texte-chronique de fin de Solitude qui a mis en exergue les temps forts de cette inédite expérience. Une projection de photos illustrant les différentes étapes et rubriques de la Solitude nous a été faite. Que de surprises agréables ! que de joie partagée et de fraternité vécue ! Nous nous sommes quittés pour que chacun se prépare pour le voyage.

3- Le jour de la séparation et du départ de Limonest


Ce samedi, nous avons célébré très tôt la messe à 6h30 pour permettre à l’un des Confrères, Julio César, qui va à Rome par train de se rendre à temps à la gare. Il est accompagné au bus par deux autres confrères. A 8h, c’était le tour des confrères Colombiens et Japonais d’embarquer pour l’aéroport de Saint- Exupéry (Lyon) où ils prendront le vol pour Montréal ou Tokyo. A 12h 30, Monseigneur Emilius Goulet et notre confrère Vietnamien Jospeh nous quittèrent pour Paris. C’est la dernière vague des départs de ce jour. Le reste des Solitaires, uniquement de la Province de France, est resté encore toute cette journée dans la maison du Prado avec le Père Daniel. Nous en avons profité pour faire les différents rangements et la mise au propre des divers lieux dont nous sommes en train de prendre congé. Le lendemain, nous avons célébré la messe dominicale en groupe réduit puis à 07h15 avant d’embarquer pour la gare Part-Dieu de Lyon. Tous les Solitaires sont repartis, chacun pour sa mission, avec de bons et beaux souvenirs de cette expérience qui restera gravée en lettre d’or dans la mémoire de nos cœurs. Merci à nos responsables à divers niveaux, merci aux organisateurs et accompagnateurs, merci à Dieu qui fait tout concourir au bien de ceux qui l’aiment. Vive la Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice !

P. Innocent ATTOUNON