Du 24 au 30 octobre 2022, Limonest

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La 9e semaine de la Solitude, hormis le programme ordinaire de la vie des Solitaires, est principalement marquée par les enseignements sur le thème de la formation des prêtres à travers deux documents magistériels majeurs des deux derniers siècles sur le sujet : l’Exhortation post-synodale Pastores dabo vobis publié par le saint pape Jean-Paul II en 1992 et la Ratio Fundamentalis Institutionis Sacerdotalis publiée par la Congrégation pour le Clergé en 2016. Le Père Emmanuel GOULARD, ancien supérieur du séminaire Saint-Sulpice d’Issy-les-Moulineaux et nouveau Supérieur provincial de France, est l’invité de la semaine ; il en a d’ailleurs profité pour rencontrer, le mercredi, les candidats de sa Province.


En formateur de prêtres averti, le Père Goulard, dans une série de plusieurs rencontres, a présenté le panorama historique de l’organisation de la formation des prêtres depuis les premiers siècles de l’Église avec une insistance sur la nouveauté propre à chaque époque avant d’exposer, la nouveauté fondamentale qu’apporte chacun des deux documents magistériels. Les enseignements du nouveau Provincial sont méthodiquement ponctués, tous les après-midis, par un petit atelier de réflexion pour confronter, de façon pratique, les Solitaires aux différents cas de figure de discernement dans la formation initiale. Notre Chronique présentera les grandes articulations des enseignements suivies de quelques notes sur la vie des Solitaires durant la semaine.


Un panorama historique de l’organisation de la formation des prêtres du Ier au XVe siècles


solitude 2022 24 30 octobre 2 1La formation des pasteurs dans les cinq premiers siècles de l’Église repose principalement sur le modèle des douze Apôtres autour de la figure du Christ avec une grande fidélité à la succession apostolique dans les nouvelles communautés chrétiennes où se remarquait déjà une organisation des différents ordres et ministères : les épiscopes, les diacres, les lecteurs, les acolytes, les chantres. Mais plus tard, le niveau social et l’instruction deviendront les seuls critères de choix. Ce seront alors les familles aisées et de classe sociale élevée ayant la facilité d’accès aux études qui donneront des ministres ordonnés et parfois même dans des familles où l’épiscopat devenait un héritage de père en fils. Avec l’Édit de Constantin en 313, qui met fin à la persécution du Christianisme devenu désormais religion d’État, et le développement du monarchisme, le choix des ministres ordonnés s’orientera vers les moines à cause de leur formation spirituelle. Le IVe et le Ve siècles privilégieront la dimension spirituelle de la formation des prêtres.


Entre le VIe et le IXe siècles, le lien entre l’Église et l’État étant fort, les évêques seront conjointement choisis par le clergé et le monarque ou les autorités civiles de la région ; mais des difficultés liées aux critères de choix très divergents de part et d’autre créent des affrontements entre les autorités civiles et le clergé. Progressivement, la papauté récupèrera la nomination des évêques. Cependant, une nouvelle difficulté se fait jour : la division entre le bas clergé, moins instruit et le haut clergé. La lutte contre les religions païennes permettra la mise en place de l’apologétique qui fixe un niveau d’instruction pour le clergé : désormais, n’accède aux ordres que celui réussit son examen canonique. Pour cela, plusieurs conciles locaux demanderont aux évêques de s’occuper de la formation du clergé en vue du ministère.


La période du Xe au XIIe siècles sera fortement marquée, entre autres, par la réforme grégorienne avec la naissance du monastère de Cîteaux, de la vie canoniale et des bibliothèques. Ainsi moines et chanoines, parmi lesquels seront choisis les ministres ordonnés, feront des formations intellectuelles de haut niveau.


Les siècles suivants, du XIIIe au XVe siècles, verront l’Église en pleine forme avec la réforme grégorienne ; de nouveaux diocèses naîtront en même temps que les grandes villes, on assistera au développement des couvents avec la prédication par les Religieux suffisamment instruits. La formation théologique universitaire se met progressivement en place avec la publication de divers directoires pour aider le bas clergé dans la charge pastorale. Mais le haut clergé et les évêques vivent dans des châteaux, au-dessus du standing de vie du peuple, creusant davantage le fossé d’une part entre le bas clergé et le haut clergé et d’autre part entre haut clergé et le peuple. L’Église devra faire des réformes.


Le concile de Trente (1545 – 1563) et le deuxième concile de Vatican (1962 – 1965)


La période du XVIe au XXe siècles verra de grandes réformes dans l’Église sur la formation des prêtres à travers deux grands Conciles, Trente (1545 – 1563) et plus tard le deuxième Concile du Vatican (1962 – 1965). Les réformes du Concile de Trente seront marquées par une vive prise de conscience ecclésiale de la formation du clergé au service de la pastorale avec une vraie impulsion spirituelle, une insistance sur l’implication des évêques dans la formation, un développement de la beauté et de la grandeur du sacerdoce. La thématique de la conversion personnelle du ministre gardera toute sa place. L’idonéité d’un candidat au sacerdoce sera évaluée à partir des aptitudes et de la droiture d’intention. La formation tiendra désormais compte des aptitudes et de la vocation du candidat.

 

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C’est au Concile Vatican II qu’il reviendra d’élaborer deux grands documents pour formaliser la formation des prêtres : Presbyterorum Ordinis (07 décembre 1965) sur la vie et le ministère des prêtres et Optatam Totius (28 octobre 1965) sur la formation des prêtres. Le Concile en émet les éléments nécessaires en donnant tout pouvoir aux conférences épiscopales avec une insistance sur la finalité pastorale du ministère, la formation spirituelle et la réforme des études (OT 4). Vatican II jette ainsi les bases de documents magistériels postérieurs.


L’exhortation apostolique post-synodale Pastores dabo vobis du saint pape Jean Paul II


solitude 2022 24 30 octobre 4 1Plus tard, dans la ligne des objectifs du Concile Vatican, sera publiée l’Exhortation post-synodale Pastores dabo vobis le 25 mars 1992 par le saint Pape Jean-Paul II précédée auparavant d’autres publications d’orientations pour la formation intellectuelle, spirituelle, liturgique…comme la publication en 1970 d’une Ratio Fundamentalis pour l’éducation catholique.


Le contexte de la convocation du 8e synode ordinaire sur la formation des prêtres dont la résultante sera l’Exhortation post-synodale Pastores dabo vobis est très particulier : dès 1970, l’Église enregistre beaucoup de départ de prêtres abandonnant le ministère, une vraie crise baissant drastiquement les vocations et un manque de formateurs.


Le synode a travaillé deux questions de fond sur la formation des prêtres : la consécration et la configuration au Christ et l’onction pour la mission dans le sens de la nouvelle évangélisation. C’est pour cela, comme nouveautés dans cette exhortation, l’accentuation sera portée sur l’identité du prêtre, sur la définition des quatre dimensions de la formation au sacerdoce, humaine, spirituelle, intellectuelle et pastorale et sur la charité pastorale comme moyen et lieu de sanctification du prêtre.


L’une des nouveautés fondamentales de Pastores dabo vobis est de faire de la dimension humaine le fondement de toute la formation sacerdotale, car pour vivre pleinement leur ministère, les prêtres doivent assumer pleinement leur humanité. Le document y trouve trois raisons : une théologique liée à l’incarnation (l’humanité du prêtre doit honorer l’humanité du verbe incarné), une pastorale (l’humanité du prêtre doit conduire à Dieu) et une autre ecclésiologique (le prêtre est un homme de communion). Pour y arriver, les pères synodaux ont mobilisé tous les outils qui permettent d’accorder une grande place à la maturité humaine et affective et de la travailler pour mener à bien ce projet de formation des prêtres à l’aube du XXIe siècle. Mais cette exhortation ne sera pas le dernier document magistériel sur le sujet.

La Ratio Fundamentalis Institutionis Sacerdotalis


solitude 2022 24 30 octobre 5 1Publiée le 08 décembre 2016, la Ratio Fundamentalis Institutionis Sacerdotalis se s itue dans la continuité de Pastores dabo vobis ; mais comme nouveauté, elle s’adresse principalement à ses destinataires que sont les acteurs de la formation des prêtres. Elle jette les grands principes de la formation qu’emploieront les conférences épiscopales pour élaborer leur Ratio Nationalis et les décliner en outils précis dans un projet de formati on dans les séminaires.


En s’adressant d’abord aux acteurs de la formation, cette Ratio définit, comme innovation, un projet de formation qui tient unifiées les différentes étapes de la formation initiale : la propédeutique, l’étape de la formation du disciple (cycle de philosophie) et l’étape de la configuration (cycle de théologie) avec la proposition d’une année de synthèse vocationnelle. Il intègre aux quatre dimensions de la formation des points spécifiques plus contextualisés avec d’autres insistances majeures. Ainsi, la dimension humaine, fondement de toute la formation du prêtre est qualifiée de systématique par la Ratio ; dans la dimension spirituelle apparaît le thème de la Docibilitas à l’Esprit Saint (docilité) qui crée une relation de communion avec Dieu et avec les frères dans l’amitié avec Jésus, le bon Pasteur et qui forme le cœur du séminariste à un amour généreux et oblatif (RFIS no 101). Dans la dimension intellectuelle, le document insiste sur l’état du disciple toujours en formation, le prêtre reste fondamentalement un homme d’étude.


Les nouvelles insistances s’expriment à travers le grand enjeu de la Ratio Fundamentalis qu’est l’unification : la formation au sacerdoce intègre les quatre dimensions de la formation ensemble et à part égale, sans polarisation ni partialité. La formation des prêtres a une dimension communautaire et missionnaire dans la dynamique de l’Église en sortie jusqu’aux périphéries et reste une œuvre missionnaire au vrai sens du terme. Le séminariste, premier protagoniste de sa formation, la formation à l’intériorité et à la communion, la liberté intérieure du candidat qui se réalise dans les justes limites entre le for interne et le for externe, l’usage des outils en Psychologie dans la formation… sont autant d’insistances secondaires relevées par le Père Goulard dans la nouvelle Ratio Fundamentalis l’après-midi du vendredi avant de prendre congé des Solitaires, pour qui la semaine n’était pas encore terminée.


Quelques notes sur la vie des Solitaires.


solitude 2022 24 30 octobre 6 1À l’issue de la séance de cours de l’après-midi du vendredi, les Solitaires ont sacrifié à la tradition du « retour sur la semaine » pour l’évaluer en présence de Mgr Goulet et du Père Daniel, deux figures de pères rassurantes pour le « groupe des douze ». A cette occasion, un petit bilan des activités de la semaine et de la vie communautaire a été dressé avec le rappel de quelques dispositions pratiques pour le pèlerinage à Paray-le-Monial le samedi et l’annonce de quelques dates imminentes touchant la fin de la Solitude. À cette séance, on pourrait deviner la joie des Solitaires d’entrer dans la soirée japonaise, soirée désirée et attendue depuis peu.


solitude 2022 24 30 octobre 7 1Magnifique soirée, elle aura marqué les Solitaires pour la diversité des spécialités japonaises qui ont garni leur table, la richesse culturelle et l’histoire politique et religieuse de ce beau pays que le Père Michel NAKAO, Japonais, a pris le soin de nous faire découvrir. L’Église aura traversé beaucoup de persécution depuis saint François Xavier, premier missionnaire et martyr au Japon, belle figure de sainteté jusqu’à saint Paul MIKI et ses compagnons, martyrs eux aussi, avant de gagner au Christ quelques âmes chrétiennes qui font, aujourd’hui, moins d’un pour cent de la population.


La dernière activité du « groupe des douze » était le pèlerinage à Paray-le-Monial, toute la journée du samedi, pour aller se mettre à l’école du cœur-sacré de Jésus. Les Solitaires l’apprendront à travers les présentations par de saisissantes vidéos ; ce cœur qui a tant aimé les hommes qu’il n’a rien épargné jusqu’à s’épuiser, mais qui ne reçoit en retour que mépris et ingratitudes ; ce cœur brûlant d’amour dont sainte Marguerite-Marie, la voyante visitandine de Paray-le-Monial, et saint Claude La Colombière, prêtre jésuite et directeur spirituel de la sainte, sont tous deux devenus les disciples infatigables. L’histoire des 30 apparitions de Jésus, dans son cœur sacré, à sainte Marguerite-Marie fait découvrir aux pèlerins, comme aux Solitaires, l’abîme de l’ignorance et de l’indignité de l’homme que le sacré-cœur de Jésus cherche à combler. L’Eucharistie, concélébrée en fin de matinée et la visite des lieux saints, la Basilique, la chapelle des apparitions, la chapelle de La Colombière, dernier acte des Solitaires-pèlerins, ont particulièrement nourri leur piété.


La note finale de cette neuvième semaine est l’accueil, ce dimanche soir, du Père Jean-Marie Brauns, directeur au séminaire Saint-Sulpice d’Issy-les-Moulineaux, qui a bravé la nuit pour rejoindre les Solitaires afin d’assurer la session de la dixième semaine de la Solitude.

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Père Blaise AKPOLI