Chronique de la semaine de pèlerinage-retraite des Solitaires à Lourdes du 11 au 18 septembre 2022
Les offices et l’Eucharistie, au matin de ce dimanche, annonçaient l’un des événements importants de notre Solitude, la retraite spirituelle aux pieds de Notre-Dame de Lourdes au cours de cette troisième semaine de la formation, une semaine bien pensée pour permettre aux Solitaires de profiter d’un pèlerinage au sanctuaire de Lourdes du lundi au mercredi. Le soir de ce mercredi à 20 h s’est ouverte la retraite proprement dite avec Monseigneur Lionel GENDRON jusqu’au dimanche matin. Cette chronique suivra ces deux moments qui ont rythmé le séjour du « groupe des douze » à Lourdes.
Après 7 heures de train sans compter le temps des correspondances pour se rendre à Lourdes, les Solitaires arrivaient au Centre de l’Assomption, situé sur les hauteurs offrant une vue magnifique sur la Grotte mariale. Après l’accueil par une équipe dynamique et l’installation suivis du dîner et quelques consignes générales pour faciliter les mouvements communautaires, la célébration des complies pouvait permettre au « groupe des douze » de profiter du silence du sanctuaire et de la fraîcheur de l’heure, qui pour s’offrir un moment de recueillement à la Grotte, qui pour se remettre de la fatigue du long voyage.
Ce lundi, le premier jour du séjour, après les offices et le petit-déjeuner, un programme très ambitieux attendait au sanctuaire les Solitaires qui, sortis de leur petite campagne de Limonest, sont impressionnés par l’affluence grandissante des pèlerins. Ils sont appelés à revivre l’histoire des apparitions et le message de Lourdes à travers la visualisation d’un film-documentaire pour leur permettre une bonne introduction dans la ferveur spirituelle de Lourdes. Une messe célébrée dans la chapelle Sainte-Anne entre les Solitaires a été un moment fort avant la procession eucharistique, adoration et bénédiction des malades à la Basilique Saint-Pie X prévue pour 17 heures. Il faut attendre la célébration de l’office des vêpres en communauté suivie du dîner pour honorer, à 21 heures, le dernier rendez-vous du programme de la journée : la procession mariale au flambeau sur l’esplanade du sanctuaire.
L’essentiel du deuxième jour de pèlerinage des Solitaires se résume en quatre moments d’activités communautaires intercalés de quelques moments de dévotion personnelle : la messe du « groupe des douze » à la Crypte de la Basilique Immaculée Conception, chemin sur les pas de Bernadette, la procession eucharistique avec bénédiction des malades et la procession mariale en soirée.
Tout commence par le rituel ordinaire de la matinée ; après les laudes et le petit déjeuner, le « groupe des douze » devait se préparer pour la messe dans la crypte de la Basilique où quelques pèlerins, impressionnés par leur mouvement, se sont curieusement joints à nous pour partager l’Eucharistie avec nous ; ce fut un moment fort et pour participants et pour concélébrants. Les Solitaires ne tarderont pas à rejoindre le Père Régis-Marie de La TYSSONNIÈRE, chapelain au sanctuaire de Lourdes et aumônier du Carmel ; il est un guide avisé et rompu dans la spiritualité de Lourdes. L’itinéraire que nous a proposé notre guide est autant spirituel qu’historique, ce qui nous fera découvrir tour à tour l’histoire des différents lieux de prières et des structures d’accueil des pèlerins dans le sanctuaire ; le gros morceau sera de nous faire marcher sur les pas de sainte Bernadette, une figure de sainteté dont la vie remet en cause nos fausses sécurités humaines : les péripéties de la vie de sa famille avec une précarité incomparable préparaient pourtant une terre de fécondité spirituelle qui exerce aujourd’hui une fascination sur le monde catholique. Nous avons retenu au terme de cet itinéraire avec Bernadette, que Dieu continue de descendre dans les profondeurs abyssales de la pauvreté de l’homme pour se révéler à lui et comme elle aimait répéter en reconsidérant les misères de sa famille : « quand on pense que le bon Dieu l’a permis on ne se plaint pas ». Cette belle phrase de Bernadette nous aura habités tout le parcours qui s’acheva à la grotte.
L’après-midi de ce mardi sera marqué par la procession eucharistique, une procession qui draine une foule immense de pèlerins et de personnes à mobilité réduite pour échouer, comme d’habitude, dans la basilique Saint-Pie X pour l’adoration et la bénédiction des malades.
En soirée, le « groupe des douze » s’est joint aux pèlerins pour la procession mariale sur l’esplanade du sanctuaire. Il faut attendre mercredi le jour suivant pour vivre quelque chose de nouveau dans le programme du pèlerinage des Solitaires : la messe internationale de la Croix Glorieuse, la conférence sur le thème de l’année à Lourdes et l’ouverture de la retraite qui constituera la seconde partie du séjour du « groupe des douze » à Lourdes avec, à leur tête, le Père Daniel AIZANNON, très apprécié des Solitaires pour le modèle qu’il offre à contempler et son témoignage fraternel avec eux.
Il faut noter que le cœur des Solitaires battait au rythme de l’Église universelle en entrant dans cette belle Eucharistie internationale célébrée en la fête de la Croix Glorieuse.
Messe présidée dans la matinée par un évêque polonais qui, dans son homélie, a médité avec les pèlerins sur les moyens insoupçonnés que Dieu a déployés pour notre salut, le langage de la Croix qui n’est pas une fin en soi mais le signe de l’amour de Dieu pour l’homme ; Dieu s’anéantit pour remettre l’homme à l’endroit. L’après-midi, le chapelet à la Grotte introduisit les Solitaires avec quelques pèlerins dans la conférence sur le thème : « Allez dire aux prêtres ... ! ». Le thème est tiré des propos recueillis par Bernadette, lors d’une apparition, sur les lèvres de la Vierge Marie qui disait ; « Allez dire aux prêtres de construire une église ici et que l’on y vienne en procession ». Morcelée en trois thèmes, cette recommandation de la Vierge sera vécue sur trois années au sanctuaire de Lourdes.
L’introduction à la retraite spirituelle marquera le moment du passage à la seconde phase du séjour des Solitaires à Lourdes. Elle est prêchée par Mgr Lionel GENDRON, Sulpicien et Évêque émérite de Saint-Jean-Longueuil au Canada au tour du thème : « Se laisser à l’Esprit pour vivre pour Dieu en Jésus-Christ ». Comme on peut le voir, le thème est inspiré des intuitions spirituelles de Mr Jean-Jacques OLIER avec un arrière-fond néotestamentaire qui se réfère à la lettre de saint Paul aux Galates : « Mes enfants, vous que j’enfante à nouveau dans la douleur jusqu’à ce que le Christ soit formé en vous » Ga 4, 19. Dans son introduction, le prédicateur recentre les Solitaires sur le sens de la retraite au cœur de la Solitude en la définissant comme temps de repos, de solitude – non pas dans le sens de l’isolement mais au sens où chacun est responsable en étant ensemble avec les autres – de contemplation, d’écoute et de rencontre intérieure. Il reprendra, ensuite, au compte du sous thème prévu pour l’introduction « Aujourd’hui… prenons la route… vers notre Emmaüs ! », le commentaire de l’épisode des disciples d’Emmaüs en Lc 24 pour en montrer la structure eucharistique et l’itinéraire du pèlerin que nous sommes et que guide l’Esprit Saint, l’évangélisateur principal. C’est dans ce pèlerinage que, comme formateurs, nous enfantons sans cesse sous l’action de l’Esprit Saint et dans la douleur des disciples en qui le Christ se forme progressivement.
Dès le lendemain jeudi, premier jour de la retraite, le programme restera standard jusqu’au samedi soir.
Ce jeudi matin, Mgr Lionel reprend le thème évangélique de « pèlerins engagés sur la route » pour en développer deux dimensions théologiques dans les deux instructions de la journée : « pécheurs appelés à être saints » et « disciples appelés à être sacrements vivants du Bon Pasteur », deux sous thèmes intimement liés. Nourrie de références bibliques soigneusement choisies, la méditation de Mgr Gendron, théologien avisé, conduit les Solitaires à faire leur la pédagogie que Dieu propose à son peuple en Dt 8, 1-5. Ce texte, majeur parmi tant d’autres, dénonce l’enracinement du péché dans le cœur de l’homme qui se rebelle malheureusement contre Dieu ; il dévoile, à l’opposé, le désir de ce même Dieu de partager sa joie, sa vie et son éternité avec lui en l’invitant à un combat frontal contre le péché pour une vie de sainteté. Mais pour y arriver, il lui faudra se mettre à l’écoute de la Parole de Dieu où s’origine l’appel à la sainteté. Le second thème de la journée « disciples appelés à être sacrements vivants du Bon Pasteur » y prendra tout son sens. Mgr Gendron fait une relecture de l’approche johannique de l’envoi des disciples en mission centrée sur la conjonction causative καθὼς (comme cf. Jn 20,21) qui donne à la mission du disciple envoyé par le Christ la même valeur et la même intensité que celle que Jésus reçut de son Père.
C’est ainsi que le Prélat fonde la sacramentalité de la mission reçue qui nous fait sacrements vivants du Christ Bon Pasteur dont nous sommes appelés à porter tous les sentiments en tant que pasteurs.
La journée du vendredi sera totalement consacrée à la redécouverte de l’identité du Bon Pasteur, Jésus-Christ dont nous sommes appelés à assumer le rôle dans une vraie charité pastorale comme la sienne. Des considérations exégétiques de la péricope johannique sur le Bon Pasteur (cf. Jn 10, 11-18), Mgr Lionel a aidé les Solitaires à entrer dans l’arrière-fond vétérotestamentaire du concept du Pasteur que saint Jean assume dans cette péricope avant d’en montrer la nouveauté fondamentale qu’apporte le Christ qui l’utilise. Par l’évocation d’autres textes néotestamentaires, le Prélat montrera qu’en tant que sacrements vivants du Bon Pasteur, nous sommes appelés, comme Paul s’adressant aux Thessaloniciens, à donner non seulement l’Évangile mais aussi notre propre vie pour le troupeau qui nous est confié. Dans l’après-midi, il va tirer toutes les conséquences de cette charité pastorale du Christ dont nous serons les imitateurs en tant que formateurs. Il va insister sur la participation au modèle du Christ par la vie sacramentelle et la vie intérieure qui font entrer dans le mystère du Christ qui a vécu pleinement les conseils évangéliques comme les valeurs et les signes du Royaume.
Le samedi, dernier jour de la retraite, sera particulièrement parénétique. Mgr Gendron a mobilisé des sources scripturaires, patristiques et magistérielles, pour éveiller les Solitaires au rôle des médiations de l’Esprit Saint, agent efficient de la mission pastorale, de la Vierge Marie, modèle irrésistiblement attractif vers Jésus et de l’Église qui donne la mission.
Au terme de la dernière instruction, le Père Daniel AIZANNON, dont la présence et le témoignage de vie continuent de susciter l’admiration des Solitaires, prit la parole pour remercier Mgr Lionel GENDRON pour cette retraite nourrie de témoignages saisissants et de réflexions théologiques puisées à la source des Saintes Écritures, des Pères de l’Église et du Magistère. Il annonça ensuite, à la joie de tous les Solitaires, l’heureuse décision conjointe des deux Provinces, France et Canada, de confier à Mgr Lionel GENDRON la charge d’accompagner la Solitude avec lui pour combler le vide qu’a créé l’absence du Père Argiro RESTREPO toujours absent pour des raisons de santé. Mgr Lionel accomplira cette mission pour un peu plus d’un mois, selon sa disponibilité en attendant l’arrivée de Mgr Emilius GOULET qui le remplacera pour cette même mission jusqu’à la fin de la Solitude.
La dernière phase de cette journée du samedi concernait l’évaluation du séjour à Lourdes. Les solitaires ont énormément apprécié le séjour dans sa formule pèlerinage-retraite et en ont gardé un heureux souvenir au-delà des petites difficultés liées à la restauration.
La messe du dimanche, présidée par Mgr Lionel GENDRON, sonna le glas de la fin du séjour des Solitaires à Lourdes. Après un temps de recueillement aux pieds de Notre-Dame de Lourdes, les Solitaires ont embarqué à 12h pour retrouver Limonest, devenu cher à leur cœur à 20h35.
Père Blaise AKPOLI