Le 23 mars 2016, M. Marcel Caillat, PSS, est décédé dans sa résidence, la Maison Marie-Thérèse , à Paris. Il avait 94 ans.

Né en mai 1921 dans le Calvados, il avait fait ses études secondaires dans le sud-ouest (Castres et Toulouse). C'est au grand séminaire de Toulouse qu'il a suivi sa formation sacerdotale, et c'est donc au titre de ce diocèse qu'il a été ordonné prêtre le 28 juin 1947 à Notre-Dame de Paris. Aussitôt entré dans la Compagnie, il a été professeur de philosophie et directeur pendant 10 ans au Grand Séminaire de Versailles, puis 10 autres années au Grand Séminaire de Reims. En 1966 il est devenu vicaire de la paroisse Notre Dame des Pauvres à Issy-Les-Moulineaux. Il y est resté jusqu'en 2000. Résidant de la Maison de la Solitude à Issy depuis 1991, il l'a quittée pour une résidence plus adaptée à son âge et sa santé il y a quelques mois.
C'est à Notre Dame des Pauvres (Issy) que ses obsèques sont célébrées le 29 mars 2016, mardi de l'Octave de Pâques. Il est inhumé dans le caveau des sulpiciens au Cimetière Montparnasse.

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Liturgie des obsèques:
1 Co 13, 1-13
Jn 3, 1-17

« A moins de naître d’en haut, on ne peut voir le Royaume de Dieu. »

Frères et sœurs, ceux qui ont préparé cette célébration ont choisi les lectures que nous venons d’entendre. La 1ère Lettre de saint Paul aux Corinthiens, bien connue, magnifique, et ce passage de l’évangile de Jean connu sous le titre d’ « entretien avec Nicodème ». Ce Nicodème était un notable parmi les Juifs précise l’auteur de l’évangile, un pharisien qui sincèrement parle avec Jésus : non pas pour le piéger, comme le font souvent les pharisiens dans l’Evangile, mais en honnête homme, qui cherche à comprendre, en intellectuel et religieux éclairé et fin.

Si je peux me permettre, ce choix est judicieux pour accompagner le P. Caillat dans cette étape de sa vie. Il a enseigné la philosophie pendant 20 ans dans les séminaires de Versailles puis de Reims. Sa culture philosophique a marqué sa vie de prêtre, son ministère de formateur de prêtres, son ministère en paroisse ici, à Notre-Dame des Pauvres. Enseigner à chercher la vérité ; enseigner à poser les bonnes questions ; enseigner à être toujours en question pour accéder aux choses les plus élevées, pour accéder aux réponses disponibles, pour accéder à la vérité connaissable de toutes choses, et de la vie même : c’est le propre d’un professeur de philosophie me semble-t-il, ou tout au moins un de ses traits caractéristiques.

Disciple de Jésus, le P. Caillat accueillait pour lui l’affirmation de Jésus : « A moins de naître d’en haut, on ne peut voir le Royaume de Dieu. » Une fois que la raison humaine a raisonné jusqu’au bout de ses capacités, elle constate qu’elle ne peut toujours pas accéder à la lumière : elle en a l’intuition secrète, mais sans pouvoir jamais l’atteindre par elle-même. Il faut à l’homme le secours de la grâce divine pour trouver la vérité que son esprit et son cœur cherchent. Cette vérité, c’est Jésus, « Chemin, Vérité et Vie » écrira plus loin l’auteur du 4e évangile. Cette vérité, c’est Jésus qui très concrètement révèle le visage de charité du Père. C’est dans l’accueil de cette charité, dans la décision de vivre cette charité de manière concrète et réelle que réside le secret de toutes choses : « J’aurais beau parler toutes les langues de la terre du ciel, avoir toute la science et être rempli de tous les talents du monde, s’il me manque l’amour, je n’ai rien, je ne suis rien…, un cuivre qui résonne… »

« A moins de naître d’en haut, on ne peut voir le Royaume de Dieu. » En langage biblique, « voir le Royaume de Dieu » c’est voir toutes choses sans le voile qui habituellement les masque. « Voir le Royaume de Dieu », c’est trouver ce que tout homme de bonne volonté cherche quand il cherche sincèrement le sens de sa vie et de la vie, le sens de l’histoire, le sens de ce qui se passe de grand et de petit, le sens de ce qui se passe d’infiniment grand dans l’histoire des hommes, et ce qui se passe dans les plus petits détails de l’histoire des hommes. « Voir le Royaume de Dieu », c’est connaître d’où nous venons et où nous allons, c’est connaître la hauteur, la largeur, la profondeur, c’est trouver la réponse à toutes les énigmes de l’humanité. « Voir le Royaume de Dieu », c’est trouver la paix de l’âme, pour l’éternité.

« A moins de naître d’en haut, on ne peut voir le Royaume de Dieu. » Frères et sœurs, ce matin nous accompagnons un ami, un frère, un prêtre, un chrétien, un homme. Il a donné sa vie au Christ et à l’Eglise. Il a servi, là où on l’a envoyé. Il a tissé des relations profondes. Aujourd’hui, son regard peut voir celui qu’il a servi et qu’il a essayé de faire connaître, celui dont il a cherché à éveiller le désir dans le cœur et l’esprit de ceux avec qui il a vécu. Nous sommes rassemblés dans la foi et l’amitié pour lui manifester notre reconnaissance, pour dire à Dieu merci pour la vie de son fils.

Nous sommes rassemblés pour le confier à la miséricorde de Dieu : du plus profond de sa foi, saint Jean écrit que « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. » Forts de cette même foi, nous confions le P. Caillat à la tendresse de Dieu : qu’il l’accueille auprès de lui. Qu’il réponde à ses questions. Qu’il lui pardonne ses fautes. Et, si j’ose dire, qu’il lui manifeste sa joie pour ses professions de foi spontanées et si profondes : « Dieu m’aime ! Je sais que Dieu m’aime » aimait-il à répéter… : « Dieu m’aime ! Je sais que Dieu m’aime ».

Nous célébrons ce matin l’eucharistie dans la lumière de ce jour de Pâques. Que le Christ ressuscité accueille son fidèle serviteur et lui accorde la paix et la joie éternelle.

Amen !