Du 31 octobre au 06 novembre 2022, Limonest
Nous tendons progressivement vers la fin de l’expérience inédite de notre Solitude ici à Limonest. Déjà nous en sommes à la dixième semaine que nous avons entamée ce lundi, fin du mois d’octobre, avec le Père Jean-Marie Brauns, Formateur au Séminaire Saint-Sulpice d’Issy-les-Moulineaux venu pour la session sur la théologie du sacerdoce. Quelques célébrations liturgiques ont marqué cette semaine : la clôture du mois de Rosaire avec la récitation communautaire du chapelet par laquelle nous avons honoré, ce lundi soir, notre Mère du Ciel en lui confiant nos diverses intentions ; la célébration de la solennité de la Toussaint à travers la messe présidée par Monseigneur Emilius Goulet et la commémoraison des défunts le lendemain. Ce rapport ne donnera pas les détails de ces différentes célébrations qui s’inscrivent dans un acte ecclésial en communion avec tous les chrétiens qui, dans leurs différents contextes, ont également célébré ces mêmes évènements. Nous y montrerons plutôt, dans un premier temps, la trame du parcours effectué avec le Père Jean-Marie en dégageant de ses enseignements ce qui pourrait en constituer la substance. Dans un second temps nous vous ferons part de la soirée vietnamienne par laquelle s’est ouvert le weekend pour nous, et de quelques autres événements qu’il convient de mentionner pour vous faire découvrir la richesse de cette semaine.
1- Les grandes lignes du parcours effectué avec le Père Jean-Marie Brauns
Nous avons démarré la session sur la théologie du sacerdoce avec le Père Jean-Marie ce lundi matin par ce qu’on pourrait appeler la mise en examen de quelques idées reçues et stéréotypes sur le sacerdoce. Ce travail de purification, pourrait-on dire, a bousculé des manières de percevoir et même de vivre le sacerdoce. Cela pouvait se ressentir dans les nombreuses questions posées par des Solitaires. L’approche du Père Jean-Marie s’est beaucoup inspirée de la théologie de Saint Thomas d’Aquin, figure théologique référentielle de ce parcours et du Catéchisme de l’Église catholique plusieurs fois cité et commenté.
Le premier déplacement qu’opèrent en nous ces enseignements reçus est celui de la compréhension du ministère sacerdotal et de son exercice en référence non pas d’abord au sacerdoce unique du Christ mais au ministère apostolique qui reste une participation au sacerdoce de l’Unique Médiateur, Jésus-Christ notre Seigneur. Aussi, avons-nous interrogé et évalué les expressions telles que « tu es prêtre pour l’éternité » et « alter Christus » qui sont appliquées aux prêtres ou que ceux-ci même s’appliquent. En partant de la Bible et de la Tradition de l’époque patristique, le Père Jean-Marie nous a montré que le terme « sacerdoce » est d’abord générique, qu’il est ensuite appliqué au Christ par l’auteur de la Lettre aux Hébreux qui lie sous ce terme la figure du sacrificateur et du pasteur dans la Personne de Jésus-Christ. A bien entendre notre conférencier, c’était une nouveauté par rapport à l’Ancien Testament. Il a invité à faire la part des choses entre les thèmes sacerdoce et sacrement de l’Ordre qui ne désignent pas la même réalité. Nous avons vu le développement du sacrement de l’Ordre dont les premières expressions sont recueillies dans la Tradition apostolique d’Hippolyte de Rome, un des documents importants des premiers siècles qui rend compte des débuts du fonctionnement des communautés ecclésiales et liturgiques.
Nous avons relevé l’apport fait par les Pères Cappadociens, Saint Augustin et Théodore de Mopsueste. Ces différents témoignages nous ont davantage éclairés sur la relation entre l’évêque, le prêtre et le diacre qui constituent les trois degrés du sacrement de l’ordre déjà reconnus comme tel depuis la période patristique.
Avant de nous polariser sur la théologie sacerdotale avec une référence optionnelle du conférencier à Saint Thomas, il nous a été montré les déviations historiques notamment de l’épiscopat qui était devenu fonctionnel, s’alliant ainsi au pouvoir temporel (les rois) dont l’influence avait commencé par s’étendre dans le gouvernement de l’Église. C’est dans ce contexte qu’est intervenu la Réforme ecclésial et liturgique du Pape Grégoire VII qui centralise davantage le gouvernement de l’Église sur l’Évêque de Rome. Avec Thomas d’Aquin, nous avons essayé de comprendre la relation entre les trois degrés de l’Ordre : le diacre, le prêtre et l’évêque. Nous en sommes arrivés à découvrir que la relation qui lie ces trois niveaux du sacrement de l’Ordre n’est ni hiérarchique ni successive. Elle est une relation, en quelque sorte, triangulaire. Car le diaconat est étroitement lié à l’épiscopat et n’est pas nécessairement en vue de la prêtrise. Celle-ci est également liée à l’épiscopat non pas en un sens sacramentel mais par rapport au pouvoir de gouvernement de l’évêque. Car, le prêtre tout comme l’évêque reçoit le caractère et comme tel est configuré au Christ-Tête.
Le caractère particulier et la configuration au Christ qui sont les grâces spécifiques du sacrement de l’Ordre ont été réfléchis et approfondis. Un historique du terme « caractère » que le conférencier nous appelé à différencier du sceau, nous a été d’abord fait. Ensuite, le Père Jean-Marie a établi le lien entre le caractère et la configuration au Christ. Reprenant cette grâce spécifique du sacrement de l’Ordre que le Catéchisme de l’Église Catholique précise au N°1563: « Le sacrement de l’Ordre configure les prêtres au Christ pour les rendre capables d’agir », le Père Jean-Marie a insisté sur le fait que la configuration au Christ n’est ni d’ordre physique ni moral.
Aussi, le prêtre n’est-il pas, pour lui, un autre Christ mais il agit au nom du Christ. Le ministère que confère le sacrement de l’Ordre est un ministère de représentation qui n’identifie pas le prêtre au Christ mais qui le situe comme un instrument par qui le Christ transmet sa grâce. Car l’unique source de la grâce est le Christ dans le mystère de son Incarnation, sa mort et sa résurrection.
Le cheminement effectué quand bien même un peu trop technique et académique nous a énormément enrichis et permis de comprendre davantage le ministère du sacerdoce auquel nous avons été associés par pure grâce pour la gloire de Dieu et le salut de l’humanité. Nous avons terminé ce riche parcours par des conseils pratiques et des attitudes pastorales que le Père Jean-Marie nous a donnés dans l’après-midi de ce vendredi 04 octobre. Nous avons ensuite honoré le traditionnel rendez-vous des prises de photos pour conserver la mémoire de ces beaux jours que nous avons passés en compagnie de notre hôte.
2- La soirée vietnamienne
Il était prévu pour la soirée de ce vendredi un dîner avec les plats vietnamiens. Mais avant d’aller pour ce temps de convivialité toujours attendu et apprécié de tous, nous nous sommes réunis avec le Père Daniel et Monseigneur Goulet pour la traditionnelle évaluation de la semaine. Nous avons passé en revue les différents moments de la vie de notre communauté. Rien de particulier n’a été signalé. Tout se passe encore et toujours bien malgré la fatigue qui a commencé par se faire sentir. Aussi, le Père Daniel nous a-t-il demandé de maintenir le cap d’autant plus que ces derniers jours nous solliciteront davantage. Car, nous sommes invités à rendre nos travaux de recherches pour ce temps de Solitude la semaine prochaine et à préparer nos bilans personnels pour la dernière rencontre évaluative de cette expérience inédite ici à Limonest.
Nous avons eu juste le temps d’aller prier les Vêpres après cette rencontre puis nous nous sommes rendus dans l’espace de convivialité où déjà la table était dressée, les couverts disposés et le repas apprêté par notre frère Joseph Thuan, le seul Vietnamien du « groupe des douze ». Comme à notre habitude, nous avons partagé ce temps avec beaucoup de joie et d’amitié fraternelle avec nos deux accompagnateurs. Les plats vietnamiens que certains découvraient pour la première fois ont été bien appréciés. Cette soirée s’acheva par une présentation de l’histoire du Vietnam et de la situation de l’Église dans ce beau pays à économie émergeante malgré les difficultés historiques qu’il a connues. Le catholicisme, deuxième religion après le bouddhisme dans ce pays, poursuit sa mission d’évangélisation à travers des missionnaires aujourd’hui majoritairement autochtones qui se dépensent avec grand amour pour que la lumière de l’Évangile parvienne jusqu’aux contrées les plus reculées. Cette soirée conviviale avait été précédée par deux autres moments qui constituent des notes spécifiques de cette semaines.
3- Deux autres moments de convivialité
La célébration de la fête de Toussaint nous a inspiré, en début de cette semaine, une première occasion de convivialité vécue en dehors de la maison du 
Prado. Sur proposition de quelques confrères et avec l’organisation du chargé de la convivialité et du Père Daniel, nous avons effectué une sortie-déjeuner ce mercredi midi dans un restaurant de la place. Le cadre était bien différent, l’ambiance et les mets l’étaient également. C’était un buffet et chacun a pu se servir à volonté. Nous avons bien aimé cette expérience par laquelle nous avons marqué la célébration de la fête de tous les saints. Nous n’avons pas pu le faire le mardi 1er novembre pour des raisons de convenance. Alors, nous l’avons bien rattrapé ce mercredi 02 sans offense à la mémoire de nos défunts que nous avons bien honorés à la messe du matin célébrée à leur intention.
Une autre occasion de convivialité nous a été offerte par la visite, ce vendredi 04 novembre, des Pères Mériadec MEGNIGBETO et Arnold ADJERAN, venus nous saluer. Le premier est sulpicien béninois doctorant en Histoire de l’Église à l’Institut catholique de Paris et le second, du diocèse de Dassa-Zomè au Bénin est doctorant en Philosophie à l’Institut catholique de Lyon. Nous les avons accueillis avec joie et avons partagé le déjeuner avec eux. Nos confrères béninois ont bien pris du temps avec eux pour échanger et partager des nouvelles. Nos deux hôtes sont restés avec nous longtemps avant de repartir autour de 15h. La joie de leur visite s’est prolongée jusqu’à la soirée vietnamienne qui a suivi et qui marque le commencement d’un weekend plus ou moins relaxe parce que nous n’avons pas eu d’activités communautaires. Chacun en a profité pour travailler personnellement et aussi pour se reposer du labeur d’une semaine de hautes réflexions théologiques sur le sacrement de l’Ordre dont le mystère reste inépuisable. Nous commencerons la semaine suivante avec le Père Shayne Craig, Supérieur général de la Compagnie de Saint-Sulpice sur l’étude des Constitutions.
P. Innocent ATTOUNON